AL-QAIDA EN MAURITANIE : L’Afrique sous menace

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AL-QAIDA EN MAURITANIE : L'Afrique sous menaceAl-Qaida a frappé en Mauritanie, la veille de Noël. Il s’agit d’un franchissement de seuil particulièrement inquiétant. Pour la première fois, la nébuleuse terroriste mène une action en deçà d’une certaine zone en Afrique. Jusqu’à présent, l’activité d’al-Qaida touchait des pays comme le Maroc, l’Egypte et l’Algérie. Ayman al-Zawahiri, le bras droit d’Oussama Ben Laden, ne plaisantait donc pas quand il menaçait d’étendre leur action sur toute l’étendue du Sahara. Voilà donc qu’en Mauritanie, pays traditionnellement pacifique, l’internationale de la terreur a choisi de frapper. La cible ? Un groupe de cinq touristes français : un septuagénaire, ses deux enfants et deux amis. Au total, quatre personnes tuées, et le père, ce septuagénaire, grièvement blessé aux jambes.

Ce que l’on a pris, dans les premiers moments, pour un crime crapuleux, passe, à présent, dans les discours mêmes des autorités mauritaniennes, pour un meurtre prémédité, minutieusement organisé et froidement exécuté. Les circonstances semblent accréditer l’idée de l’action terroriste.
Les acteurs d’abord. Des gens connus de la justice pour avoir été accusés, à diverses reprises, devant les tribunaux, pour accoin- tances avec des mouvements terroristes, notamment avec l’ex-Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) qui a sévi en Algérie pendant les années sanglantes de la terreur islamiste, avant de se transformer en 2005 en branche maghrébine d’al- Qaida. C’est ce mouvement qui, sous le nom d’al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), a commis des attentats en Algérie, le 11 décembre dernier, contre des institutions judiciaires et contre le siège du HCR à Alger. Le principal suspect du quadruple meurtre du 24 décembre aurait été convaincu de participation à des camps d’entraînement terroriste en Algérie.

Les victimes ensuite. Des innocents anonymes, comme c’est souvent le cas dans les attentats terroristes. De paisibles touristes qui pensaient seulement faire une halte là, par hasard ; avant de poursuivre leur chemin. Ils avaient peut-être, en plus, le tort d’être Français ou Occidentaux, bref, quelque chose qui ne constitue une raison de mise à mort que dans l’aveuglement et la folie des fanatiques.

L’objectif enfin. Comme toujours, imprécis, nébuleux ou oraculaire. Voulait-on s’en prendre à des Français et à des Occidentaux de façon générale ? Voulait-on porter un coup à l’économie d’un pays dont l’Etat s’est allié aux Etats-Unis dans sa croisade contre le terrorisme, un Etat qui entretient des relations diplomatiques avec Israël et qui n’a pas condamné l’équipée de Georges Bush en Irak ? Si tel est le cas, l’action ressemble à celles que mènent de temps à autre les Frères musulmans en Egypte, quand ils portent des coups au tourisme qui est à la fois un secteur économique évidemment important au pays des pyramides, et une activité tournée vers les Occidentaux. En effet, le quadruple meurtre de la veille de Noël est un mauvais coup pour le tourisme mauritanien.

Tous ces éléments donnent à cet événement un aspect particulièrement inquiétant pour les Africains qui doivent se sentir sous la menace d’attentats terroristes, puisque ce qui est arrivé en Mauritanie peut arriver n’importe où dans nos pays mal armés pour faire face à de telles attaques. On ne peut pas s’empêcher de penser que, compte tenu des mesures qui sont prises en Occident, il devient de plus en plus difficile pour les terroristes d’opérer en Europe et aux Etats-Unis qui sont constamment sur le qui-vive. Et qui ont d’autres moyens pour donner corps à une politique sécuritaire crédible, donc dissuasive dans une grande mesure. Nos pays ne risquent-ils pas d’être dans ces conditions, des espaces où les terroristes peuvent refluer ? L’Afrique n’est-elle pas une proie facile ? Nos forces de sécurité n’ont ni les moyens, ni l’expérience qui leur permettraient de faire face à des périls de ce genre. C’est peut-être le moment d’ouvrir l’oeil, le bon, et de ne pas penser que « ça n’arrive qu’aux autres ».

Peut-être est-ce la conscience de ce danger qui explique le positionnement des Américains au Sahel. Est-il vrai que dans la configuration actuelle, il devient de plus en plus risqué d’entretenir de bonnes relations avec les Etats-Unis ? Si al-Qaida ne peut pas opérer sur le sol même des Etats-Unis, il essaiera de frapper les intérêts américains là où cela est possible, partout dans le monde. Qui sait s’il ne sera pas tenté de « punir » les Etats qui se feront les alliés des Américains ? On connaît les déclarations du numéro deux du mouvement d’Oussama Ben Laden contre les Etats et les dirigeants « corrompus » du Maghreb.

Il est clair que dans l’histoire comme elle va, dans le monde tel qu’il est entraîné par le mouvement de la globalisation, l’Afrique ne peut pas être à l’écart. Si elle ne peut pas tirer des bénéfices du processus de mondialisation, elle ne peut pas en éviter les risques et les périls. Si elle n’est pas capable d’anticiper et de réagir, elle sera la victime de l’histoire : elle n’aura pas sa part des biens, mais elle aura, à chaque fois, toute sa part des maux de l’humanité. En effet, du choc de civilisations, l’Afrique peut penser qu’elle est à l’écart ; elle peut croire qu’elle va échapper aux foudres de l’Occident et aux coups des islamistes. Les événements du 24 décembre en Mauritanie comportent cet enseignement : c’est une erreur de se croire à l’abri dans ce monde, décidément trop petit. Il faut que le berceau de l’humanité s’apprête à affronter les problèmes de ce monde. Et le terrorisme est l’un de ceux dont il est temps de se préoccuper. Il nous faut ouvrir l’oeil, nous doter de réelles capacités de réaction, renforcer la coopération transfrontalière. Nos Etats ne doivent pas perdre de vue que le premier devoir d’un Etat digne de ce nom est d’assurer la sécurité des hommes, des femmes et des biens. La question de la sécurité du citoyen est de celles qui ne peuvent pas rester sans réponse.

Source: Africatime

Posté   le 28 Dec 2007   par   biko

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