ABDOULAYE BATHILY Candidat à la Présidentielle 2007: «Wade veut interdire l’importation des tissus rouges au Sénégal et léser Bakel»

Google+ Pinterest LinkedIn Tumblr +

Abdoulaye BathilyLe Congrès d’investiture de la Ligue démocratique/Mouvement pour le parti du travail (Ld/Mpt) se tient le 20 janvier prochain au stade Iba Mar Diop. A la suite du Bureau politique et du Comité central de la formation, l’instance suprême de la Ld/Mpt entend ainsi investir le Pr. Abdoulaye Bathily, pour défendre les couleurs « jallarbistes » à la présidentielle du 25 février prochain. Il définit ici, dans l’entretien accordé à Sud Quotidien, le sens de sa candidature. Pour Abdoulaye Bathily, « il faut créer les conditions pour que la gouvernance à partir de valeurs, d’éthique, soit désormais une réalité pour le pays ». Celui qui réclame sa part de responsabilité dans la survenue de l’alternance du 19 mars 2000, n’en est pas moins critique à l’endroit de la conduite des affaires du pays par les libéraux du Parti démocratique sénégalais (Pds). Selon Abdoulaye Bathily, «Me Wade veut interdire l’importation des tissus rouges », tant la contestation est généralisée.

Quel est le sens de la candidature de Abdoulaye Bathily à la présidentielle de février prochain et pourquoi ?

Ma candidature à l’élection présidentielle de février 2007 est dictée par la situation nationale. Le Sénégal traverse une phase cruciale de son histoire, marquée notamment par l’échec retentissant du régime issu de l’alternance du 19 mars 2000, alternance à laquelle, moi-même et mon parti, la Ld/Mpt avons fortement contribué. Sur tous les plans le pays a reculé. Sur le plan économique, tous les indicateurs sont là. De manière concrète, l’effondrement des Industries chimiques du Sénégal (Ics), le désarroi du monde rural, la crise aggravée de la pêche et du tourisme. Tous ces phénomènes économiques conjugués ont accentué le désarroi au sein de la population, notamment des jeunes qui, de façon inédite dans l’histoire de notre pays, ont pris d’assaut, par milliers les pirogues, pour aller chercher les chemins de leurs avenirs ailleurs que dans leur propre pays. Alors que ces jeunes ont participé massivement à la mobilisation populaire, à la marche bleue qui a porté Abdoulaye Wade au pouvoir. Aujourd’hui, c’est donc un devoir pour moi de participer à l’élection présidentielle pour montrer aux Sénégalaises et aux Sénégalais que l’on peut gérer le Sénégal autrement et mieux. Qu’il faut créer les conditions pour que la gouvernance à partir de valeurs, d’éthique soit désormais une réalité pour le pays.

Concrètement qu’est ce que vous proposez aux Sénégalais ?

Par rapport à ma longue expérience politique et l’observation de ce qui se passe dans notre pays, je suis plus enclin à une gestion plus démocratique du pouvoir en mettant à contribution l’expertise nationale, le savoir et le savoir-faire des Sénégalaises et des Sénégalais de l’Intérieur comme de l’Extérieur. En adoptant une démarche participative dans la conception, la formulation et la mise en œuvre des politiques. On le voit donc, je ne ferai pas une gestion solitaire du pouvoir, car je ne suis pas un Messie. J’entends être un capitaine à la tête de l’Equipe Sénégal. Un animateur d’équipe. Bien entendu, j’ai l’expérience de la gouvernance en tant qu’ancien ministre de l’Environnement. On se souvient bien de l’impulsion que nous avons cherchée avec le soutien et la bonne foi des fonctionnaires, agents et partenaires du département, à donner et que nous avions donné à ce secteur. Il en est de même pour la petite année passée dans le secteur de l’Energie. Les compatriotes se rappellent également ce que Mamadou Ndoye a fait dans le secteur de l’Education nationale entre 1993 et 98. Ce qu’un Yéro Deh a fait à la Fonction publique, ce qu’un Seydou Sy Sall a fait à l’Urbanisme et à l’aménagement du territoire. Nous savons certes qu’il existe des compétences dans les autres partis du pays, hors de ces partis, dans la société civile etc. J’entends donc être le président de tous les Sénégalais. Une fois élu, je prends l’engagement de démissionner de mon poste de Secrétaire général de la Ld/Mpt. Je prends également l’engagement de proposer un référendum constitutionnel pour modifier les institutions en installant d’abord un régime parlementaire. Pour que l’Assemblée nationale soit restaurée dans ses capacités de contrôler l’action gouvernementale, mais aussi que l’Exécutif soit l’émanation de la majorité parlementaire. Je voudrais que le président de la République s’occupe des grandes questions de la vie nationale, internationale, qu’il soit un cadre de référence morale. De ce point de vue, la fonction de président de la République est celle d’animateur de la vie publique nationale, de régulateur des institutions. Elle doit permettre de prendre des mesures qui tendent toujours à souder l’unité nationale. Une unité qui est aujourd’hui, sérieusement malmenée. Donc garant de l’unité nationale, animateur de la vie politique dans le sens moral. Il veillera bien entendu à ce que l’éthique soit à la base de l’action publique, tout comme il s’évertuera à impulser le développement économique et la juste répartition des ressources générées par le peuple et pour le peuple.

Est-ce à dire que si vous êtes élu, vous appliquerez le programme commun de la Cpa ?

Le programme commun de la Cpa est un programme minimum sur lequel, beaucoup de partis sont d’accord. Les partis de la Cpa. J’ai pris l’engagement de respecter ce programme, je le respecterais. Je nommerais le Premier ministre désigné par la majorité parlementaire. Je ne mêlerais pas du fonctionnement de la majorité.

Quel est l’axe diplomatique du candidat Bathily ?

Un des signes de l’échec du régime de Abdoulaye Wade est également la dégradation de l’image du Sénégal à l’étranger. Il a multiplié plus que de raison les missions diplomatiques, les ressources et surtout les ressources humaines n’ont pas suivi. La diplomatie sénégalaise, je suis à l’aise pour le dire, du temps du Parti socialiste (Ps), était reconnue pour sa qualité de manière générale. C’est tout le contraire aujourd’hui. En témoigne, des coiffeuses qui sont nommées consuls etc. En plus de cette baisse au niveau des ressources humaines, on a assisté à des initiatives malheureuses que ce soit sur le plan sous régional à la Cedeao, à l’Uemoa, l’entretien de conflits de caractère personnel qui n’ont rien à voir avec nos intérêts, avec nos voisins, tout comme avec certains de ses homologues. Des mesures hasardeuses, irréfléchies souvent sur certaines crises dans lesquelles, le Sénégal aurait pu jouer des rôles importants. La Côte d’Ivoire, le Darfour par exemple.
Nous voulons donc restaurer la diplomatie, lui redonner ses lettres de noblesse. Par une politique sage, pondérée, fondée d’abord sur l’amitié avec nos voisins, sur les principes d’intégration économique et politique, dans le cadre de l’Union africaine. Une diplomatie également qui permettra au Sénégal de retrouver sa place dans le concert des nations, de jouer pleinement son rôle dans les échanges internationaux.

Pensez-vous que le processus électoral est sécurisé ?

Nous nous sommes battus pour la transparence et la régularité de ce scrutin. Le rôle important que joue notre camarade Ousmane Badiane dans le comité des plénipotentiaires de l’opposition, d’abord dans « Clarté na leer », ensuite au sein de la Cpa entre dans ce cadre. Un rôle à la mesure de l’intérêt que notre parti accorde à la transparence et à la régularité des élections. Bien entendu, il y a des problèmes dans ce processus électoral. La question du fichier, celle des cartes d’électeur. Des milliers de Sénégalais attendent encore d’entrer en possession de leurs cartes d’électeur. Il y a le contentieux dont un mois ne suffit nullement à épurer. Il nous faut donc réfléchir et résoudre tous ces problèmes en accélérant la cadence.
Malgré tous les problèmes que vous évoquez, vous semblez tenir à l’organisation le 25 février des élections.
Nous tenons évidemment à ce que les élections se tiennent à date. Parce qu’en réalité Abdoulaye Wade et son régime savent pertinemment que s’ils vont aux élections, ils sont battus et c’est la raison pour laquelle, ils suscitent tous ces problèmes pour qu’il n’y ait pas d’élections. Nous ne saurons l’accepter. Il nous faut donc accentuer la pression pour que dans les prochains jours, ces questions soient réglées. On peut bien les régler. Il faut que la Cena joue son rôle. J’ajoute que la question électorale ne regarde pas seulement les partis politiques, elle concerne la société dans son ensemble. Par conséquent, il revient à tous les citoyens d’exiger et d’obtenir des élections transparentes, régulières et démocratiques. Cela est une exigence citoyenne. Maintenant, même si on reporte les élections en 2050, Abdoulaye Wade ne sera jamais prêt.

Le Conseil d’Etat vient d’accéder favorablement à la requête du Ps et renvoie l’Exécutif à sa copie en ce qui concerne la répartition des siéges au scrutin majoritaire départemental. N’est-ce pas là, un motif valable pour renvoyer les élections ?

Pour une fois, depuis que Abdoulaye Wade est au pouvoir, une juridiction a pris une décision allant dans le bon sens. Il faut saluer cela. J’avais fait un recours à titre de citoyen sénégalais de Bakel, qui a trouvé que le département était lésé. Notre recours et celui du Ps étaient imparables. Abdoulaye Wade a violé la loi. Le Conseil d’Etat a fait du dilatoire. Malgré tout, cela ne doit pas être un moyen de report. Il suffit de prendre immédiatement un nouveau décret conforme et que les listes soient corrigées en conséquence dans les 72 heures qui suivent. Nous n’accepterons pas un quelconque report.

Exit le premier septennat post-alternance marqué et rythmé cependant par les «affaires. Chantiers de Thiès, affaire du corbeau, corruption dans la magistrature, et la récente tentative de corruption du journal Quotidien etc.». Comment en est-on arrivé là ? En assumez-vous néanmoins les comptes et les mécomptes ?

J’ai la responsabilité d’avoir participer activement à l’élection de Abdoulaye Wade. Cela est incontestable. Les Sénégalais en sont témoins. Au début de l’alternance, je pensais que Abdoulaye Wade avait tous les moyens de relever le Sénégal. De le faire avancer, de le faire progresser dans tous les domaines. Ce que j’ai vu à travers la mobilisation du peuple sénégalais le 19 mars 2000, autorisait tous les espoirs, toutes les victoires. Mais très tôt, nous avons constaté que Abdoulaye Wade s’était engagé dans un exercice personnel et partisan du pouvoir. Il a rejeté et relégué en les marginalisant, tous ceux qui ont contribué à cette victoire. Dès 2001, la presse en témoigne, je n’ai pas voulu me taire sur ces dérives. Je me rappelle de l’entretien que j’avais accordé à Sud Quotidien à cette date et qui était titré « la majorité silencieuse pourrait descendre dans la rue ». Abdoulaye Wade m’en a voulu en disant « qu’il n’y aura jamais de majorité contre lui dans la rue… » Je lui avais rétorqué dans son bureau que le peuple sénégalais n’adhérait pas à un homme, qu’en votant pour lui, il aspirait à un mieux être. Et quelque soit l’homme qui serait à la tête du pays, fut-il Abdoulaye Wade, il descendrait dans la rue s’il est insatisfait des politiques menées, comme il l’a fait tout au long de la campagne de 2000. Il n’y a pas cru. Aujourd’hui, nous en sommes témoin, à tel point qu’il veut interdire les importations de tissus rouges au Sénégal de peur des brassards. Il paraît qu’ils sont en train de faire le tour des marchés pour demander aux commerçants et autres importateurs de ne point importer du tissu rouge.

J’assume donc la responsabilité d’avoir concouru à son élection, mais cela s’arrête là. J’ai dans le gouvernement, tant que j’y étais, fait ce que j’ai pu pour être conforme à ce pourquoi j’avais appelé à faire élire Abdoulaye Wade. Il m’a poussé à la porte. Il a posé des conditions à mon retour que je ne pouvais pas accepter par principe. Mes camarades qui y étaient restés ont donné le meilleur d’eux-mêmes. Tout le monde peut en témoigner. Face en outre aux dérives qui s’accentuaient, nous avions demandé la mise en place de la Direction politique unifiée de l’alternance (Dpu) pour en corriger à temps les impairs. Il n’en n’a pas voulu. Nous en avions tiré les conséquences car nous ne pouvions point avaliser ces dérives. Il est donc le seul et l’unique responsable de tout ce qui est arrivé par la suite, parce qu’il n’a jamais voulu écouter les suggestions et les points de vue des partis avec lesquels il a pourtant fait tout ce chemin.

Les questions sociales, notamment les manquements observés dans l’approvisionnement du gaz butane, le retour des délestages, les grèves qui minent le monde du travail, dans le secteur de l’éducation principalement etc., sont au cœur de l’actualité. Qu’est-ce qui l’explique selon vous ?

Simplement l’échec tant dans la conception, la formulation, que dans l’exécution de politiques qui nous a mené dans une pareille situation. Les décisions sont prises par un seul homme ou avec un groupe d’hommes et de femmes qui ont pour souci autre chose que l’intérêt national. On a donné la priorité à des choses qui sont, pour moi, secondaires pour le peuple sénégalais. Ce que l’on baptise pompeusement les grands chantiers par exemple. Ces gros investissements à coups de milliards effectués dans certaines villes où se meuvent les barons du Parti démocratique sénégalais (Pds) à l’occasion du 4 avril, date de la fête de l’indépendance. Chaque année, on met des milliards pour une route, deux routes, le temps d’un défilé. Je me suis toujours opposé à cela. Quand on voit ce qui se passe à Dakar, notamment au niveau de la Corniche ouest, on se rend facilement compte que ce n’est pas la priorité des Sénégalais. Des dizaines de milliards injectés dans des infrastructures qui ne concernent pas la majorité des Sénégalais. C’est pour une minorité de nantis, ou peut être des touristes et ceux qui empruntent la corniche. A côté de cela, le monde rural est abandonné, en proie à l’échec total en matière de commercialisation agricole, l’arachide, le riz et la tomate dans la vallée. Quand on regarde la pêche et le tourisme, on voit bien que toutes les mesures qui ont été prises, n’avaient rien à voir avec la nécessité de relancer ces secteurs. Les Ics n’en parlons pas. Tout cela sur un fond de corruption généralisée. Abdoulaye Wade et nous, étions engagés à lutter contre la corruption. Tous les Sénégalais constatent aujourd’hui que la corruption a été multipliée par milliards sous son régime. Le pays est laissé à l’abandon. Les besoins des populations importent peu pour eux. Dès que vous sortez de Saint-Louis si vous empruntez la bretelle qui va de Saint-Louis à Bakel, vous vous rendez compte qu’il n’y a plus de routes carrossables. Cette dorsale frontalière avec le Mali et la Mauritanie est complètement impraticable aujourd’hui. Alors que c’est un axe économique central pour notre pays.

Le pouvoir déclare cependant que ce qu’il a investi en six ans dans ce domaine, ses devanciers ne l’ont pas fait en plus de quarante ans. Que répondez-vous ?

Il a investi dans des secteurs qui ne sont pas une priorité pour les populations et l’économie nationale. Pour revenir aux routes, au niveau de la Nationale 1, à partir de Kaolack, jusqu’à Kolda, elle est défoncée, impraticable. Or, cet axe est central. La Nationale 1 aurait pu être l’axe économique majeur du pays car elle désenclave le Mali, surtout quand on sait la situation qui prévaut en Côte d’Ivoire. De Tamba à Kolda, c’est la même chose. Il en est de même de Kolda à Ziguinchor, la route du Sud est inutilisable. De Kaalack à Karang c’est la même chose. Tout comme la trans-gambienne, impraticable sur une bonne partie. Par conséquent, les infrastructures routières dont ils se gargarisent ne correspondent point aux besoins de l’économie sénégalaise. C’est un mauvais choix. Que dire de l’aéroport de Diass, sinon que là également, ce n’est point une priorité. Il n’y a pas plus de quinze avions qui atterrissent ou décollent de l’aéroport Léopold Sédar Senghor. C’est dire que dans les 20 prochaines années, cet aéroport suffirait encore au trafic, moyennant quelques aménagements à faire. Abdoulaye Wade avait dit que Diass serait construit sans bourse déliée. Que constatons nous ? Non seulement le budget national y contribue, mais aussi tous les citoyens sénégalais ou étrangers qui partent ou viennent au Sénégal payent une surtaxe qui a renchéri les billets d’avion et l’utilisation des installations aéroportuaires. Les questions énergétiques. Qu’a –t-on fait des journées de l’Energie et de l’eau ? Nous avions voulu booster les capacités de stockages de la Sar quand nous étions au ministère de l’Energie et de l’hydraulique en prévoyant l’installation même des citernes à Tambacounda, à Matam pour desservir le Mali et la Haute Casamance. A la place, nous avons assisté à des opérations douteuses, privées, familiales dans ce secteur. Résultat : la catastrophe à laquelle nous assistons aujourd’hui. La raffinerie est en crise. Les approvisionnements en carburant sont hypothéqués, une situation jamais observées dans le passé.

Propos recueillis par Madior FALL
Sud Online

EXERGUES

1/ Des jeunes qui, de façon inédite dans l’histoire de notre pays, ont pris d’assaut, par milliers les pirogues, pour aller chercher les chemins de leurs avenirs ailleurs que dans leur propre pays…

2/ Aujourd’hui, c’est donc un devoir pour moi de participer à l’élection présidentielle pour montrer aux Sénégalaises et aux Sénégalais que l’on peut gérer le Sénégal autrement et mieux.

3/ J’entends être un capitaine à la tête de l’Equipe Sénégal. Un animateur d’équipe.

4/ Il veut interdire les importations de tissus rouges au Sénégal

Posté   le 14 Jan 2007   par   Fatou, une

Share.

About Author

Comments are closed.