Vaincre le paludisme , une priorité pour sauver l’Afrique

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Une personne meurt du toutes les trente secondes dans le monde. Une maladie pourtant facilement soignable mais hors de prix pour les pays pauvres où il sévit. Un candidat vaccin est en train de terminer des tests cliniques très encourageants. Un moyen pour délivrer l’Afrique de ce mal endémique.
« Un début d’espoir pour un vaccin contre le paludisme » : C’est le titre que les deux chercheurs Williams E. Collins et John W. Barnwell ont rédigé pour leur éditorial à la revue médicale « The New England Journal of Medicine » qui publiera le 11 décembre 2008 deux études sur les résultats des essais cliniques en phase 2b d’un vaccin contre le paludisme accessible en téléchargement dans cet article.

Un fléau de l’Afrique

Le paludisme (ou malaria) est l’un des véritables fléaux qui frappent la planète depuis cinquante mille ans. On aurait recensé entre 250 et 500 millions de cas et la maladie et c’est la cause de la mort chaque année de 1,5 à 3 millions de personnes, essentiellement en Afrique subsaharienne (pour 80% des cas). Un mort toutes les trente secondes.

La cause, elle est connue depuis la fin du XIXe siècle grâce à deux futurs Prix Nobel de Médecine, Alphonse Laveran et Ronald Ross.
C’est un parasite (plasmodium) qui est transmis à l’être humain par un moustique femelle, l’anophèle. Le parasite circule alors dans le sang et détruit les globules rouges (hématies).

C’est pourquoi on retrouve les principaux cas dans les pays tropicaux chauds et humides où sévissent les anophèles femelles. Cependant, certains cas peut être transmis hors de ces pays à risque, en raison de la multiplication des déplacements internationaux (voir ici).

Une fois le parasite transmis, le corps subit des fièvres par intermittence, parfois jusqu’à 41°C, et sans soin, la mort est inéluctable. C’est une véritable récurrence qui peut être mortelle mais en le sachant, le malade peut se préparer de quoi se soigner en cas de prochaine fièvre.

Comment éviter la maladie ?

Un moyen simple et bon marché pour éradiquer le moustique, c’était le DDT (dichloro-diphényl-trichloréthane) dans les années 1960. Hélas, ce produit chimique a été interdit par l’OMS en 1992 (considéré comme polluant persistant) et avait engendré des mutations chez l’anophèle (devenu résistant) et des intoxications chimiques en Inde.

Pour se prémunir d’éventuelles piqûres d’anophèles, il faut soit les éloigner avec le répulsif DEET (N,N-diéthyl-3-méthylbenzamide) soit prendre par prévention, lors d’un séjour en zone tropicale, de la chloroquine (marque connue : nivaquine), molécule qui ne suffit plus dans de nombreuses régions, et prendre aussi de la quinine. Les meilleures protections sont maintenant assurées par des médicaments comme la Malarone ou le Lariam.

Mais ces médicaments coûtent très chers, environ 1 500 euros par an et par personne (au prix achetés en France), ce qui est hors de portée des locaux et n’est accessibles qu’aux personnes se rendant dans les régions à risque pour une courte durée (tourisme ou déplacement professionnel).

Quelques efforts sanitaires pour réduire le fléau

Quand on voit les énormes dégâts humains de cette maladie, et les coûts très élevés pour les soins, on comprend que le paludisme est d’abord une maladie mortelle de pays pauvres.

Pourtant, des efforts ont été réalisés : la proportion de la population mondiale exposée au risque de paludisme est passée en cinq ans de 48% (en 2002) à 35% (en 2007). C’est encore beaucoup trop, mais la tendance est bonne. Ces statistiques proviennent du Malaria Atlas Project. Certains chercheurs de ce projet considèrent même que le réchauffement climatique réduirait encore les risques de transmission du plasmodium. Mais il manquait avant tout un vaccin pour éradiquer la maladie.

Un bon candidat vaccin

Depuis plusieurs décennies est développé un vaccin comprenant une partie de l’enveloppe du plasmodium et un adjuvant pour accroître son efficacité (AS01 ou AS02).

Ce 11 décembre 2008, deux études sont publiées (voir en annexe) pour présenter les résultats de deux tests cliniques en avant-dernière étape (phase 2b) sur le vaccin candidat RTS,S/AS02.

Le premier a eu lieu en Tanzanie sur 340 enfants de moins d’un an : le vaccin a réduit de 65% le nombre d’infections et de 59% les épisodes de paludisme après infection pendant une période supérieure à six mois.

Le second test a eu lieu au Kenya sur 894 enfants de cinq à dix-sept mois : réduction ici de 53% des épisodes de paludisme sur une période de huit mois.

Apparemment, le vaccin pourrait s’administrer avec les autres vaccins habituels destinés aux enfants, ce qui rendrait son utilisation facile et bon marché, selon Collins et Barnwell.

Au Mozambique, on avait déjà démontré que des adjuvants permettaient aussi une baisse de 35% des épisodes de paludisme sur dix-huit mois.

Le directeur de l’association Initiative Vaccin contre le Paludisme, Christian Loucq, est très optimiste : « Nous sommes plus près que jamais de la mise au point d’un vaccin contre le paludisme pour les enfants en Afrique. (…) L’histoire a montré que les vaccins sont l’outil le plus puissant pour maîtriser et éliminer les maladies infectieuses. Manifestement, le monde a besoin de façon urgente d’un vaccin efficace et sûr pour gagner la guerre contre la terrible maladie. ».

Rien n’est encore fait

Pour se réjouir, il faut surtout attendre la confirmation de ces résultats en phase finale des essais cliniques (phase 3) qui commencera en début 2009 dans sept pays africains avant de pouvoir faire homologuer le vaccin. Elle concerne une étude statistique à très grande échelle dans les zones à forte infection.

Ce vaccin, qui a été mis au point par la multinationale GlaxoSmithKline, ne sera de toutes façons pas suffisant pour réduire complètement cette maladie et il faut aussi beaucoup de pédagogie auprès des populations dans les pays tropicaux notamment sur l’importance de ne pas utiliser d’eaux stagnantes (où sont logées les larves de l’anophèle) et de mettre des moustiquaires imprégnées d’insecticide.

Et sans doute faudrait-il plusieurs vaccins différents, étant donné le nombre de souches différentes.

Même si la recherche sur les maladies orphelines est nécessaire, on peut penser cependant que la réponse au paludisme mériterait encore plus de moyens car il s’agit de sauver plus d’un million de personnes chaque année.

Sylvain Rakotoarison (9 décembre 2008)

Source: Agoravox

Posté   le 14 Dec 2008   par   doudou

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