El Hadji Sidy SAKHO, le chasseur de la Savane restera toujours dans nos cœurs

Google+ Pinterest LinkedIn Tumblr +

Ce mardi 12 juin 2012, dès le petit matin, nous apprenions, avec une grande tristesse, le décès de Monsieur El Hadj Sidy SAKHO, le Chef de Village de Diawara.

Né vers 1918, à Diawara, El Hadj Sidy SAKHO était l’une des mémoires vivantes de cette ville. À 29 ans, il  alla, comme c’était fréquent à l’époque (dans les quatre coins du Sénégal), en France ; Bordeaux fut sa ville d’adoption, une ville qui est restée dans son cœur comme les beaux paysages du Nil restèrent dans celui de Chateaubriand, puis ensuite Marseille, la cité Phocéenne. De 1947 jusqu’à sa retraite, en 1977, il a toujours exercé le métier de docker. D’ailleurs, je me souviens, il y a près de deux décades, après avoir lu le « Docker Noir » d’Ousmane Sembène (qui exerça lui-même cette profession), un chapitre entier  de ce roman était  consacré à ses compagnons de travail parmi lesquels, se trouvait El Hadj Sidy SAKHO (et dans ce chapitre, Sembène rendait un hommage sincère à ces « sarakholés » sérieux et travailleurs).

En effet, je me souviens, pendant les tendres années de mon enfance, au début de la première moitié des années 80, à la Place Koutora, à Diawara, ces heures où la clémence céleste nous couvrait de douceur juste avant le crépuscule, nous écoutions avec intérêt les récits de voyage de grand-père El Hadj Sidy SAKHO.  Je l’ai entendu dire un jour qu’il a côtoyé Ousmane Sembène pendant ces années-là, de manière assez brève, et la lecture de ce chapitre me plongea dans  ce souvenir.

Il nous faisait un récit de ses voyages en mer qui duraient des semaines, plusieurs semaines ; il nous magnifiait la beauté marine, les paysages marins, la poésie qu’il éprouvait, souvent, un peu avant la tombée de la nuit, à contempler l’horizon infini de la mer, les couchers de soleil, et la diversité ethnique de la population du bateau (asiatiques, africains, européens), lui remplissait très certainement le cœur de bonheur.

El Hadj Sidy SAKHO  est de ces personnes qui ont marqué des générations entières à Diawara, des gens qui sont aujourd’hui trentenaires et quadra. Il aimait les enfants, il ne cessait de nous raconter des choses, non pas ces choses futiles, mais ces choses qui secrets de la savane, ces secrets mystiques qui se transmettaient, naguère, de père en fils et ce, depuis la nuit des temps immémoriaux : c’était un génial chasseur ! Un jour, nous étions plusieurs enfants de mon âge, sous l’ombre du « dindé khooré » (une sorte de grand arbre des Tropiques, certainement de la famille des baobabs), sur le « koora », un cortège d’oiseaux sauvages noircissait les cieux, il saisit son fusil et avec la dextérité d’un géomètre, plusieurs oiseaux (canards, oies, thillis, etc.) tombèrent les uns après les autres ; puis de sa voix posée et lisse, il  nous demandait de les ramasser et de les griller, ce que nous fîmes pour notre grand plaisir culinaire. C’était ça aussi, le bonheur d’un enfant de la savane, d’un enfant d’Afrique de cette époque ; ces instants qui vous marquent et qui restent en vous  jusqu’à la tombe.

Kissima Sidy était une personne  d’une gentillesse extrême,  d’une grande humanité, d’une ouverture d’esprit qui faisait de lui un visionnaire, ouvert vers l’avenir. Il était également  l’un des rares Robin des Bois de son époque, un grand bienfaiteur  dans la plus grande des discrétions.  

Son règne, comme Chef de Village de Diawara, commença un jour de septembre 2008, après le décès de feu Fousseynou Demba SAKHO (paix à son âme !). En près de quatre ans de règne, Diawara est resté ce havre de paix qu’il a toujours été, l’écoute et la concertation étaient ses priorités, jamais il ne s’éloigna de ses administrés, il avait toujours ce souci capital de répondre à leurs aspirations ; il soudait, il ne créait point de dissension ; de toute manière sa nature ne pouvait que le prédisposer à la bonne gouvernance dans l’harmonie et dans l’entente.  

Sa disparition nous laisse le cœur rempli de chagrin et de douleur ; mais l’œuvre qu’il laisse derrière lui, ne peut que nous encourager à suivre ses pas et à œuvrer pour la cohésion et l’entente entre nous, à Diawara.

Qu’Allah lui accorde le Meilleur de Ses Paradis. Amine !

Share.

About Author

Comments are closed.