Mauritaniens noirs tués entre 1989 et 1991: La junte annonce des réparations

Google+ Pinterest LinkedIn Tumblr +

Les populations de la vallée ont accueilli hier le Général Mohamed Ould Abdel Aziz qui a débuté sa visite par la ville de où il a prononcé un discours de compassion et d’affliction devant les populations de Gorgol avant d’assister à la prière de l’absent à la mémoire des victimes des drames qui ont endeuillé les habitants de cette partie sud de la Mauritanie durant les années de braise.La cérémonie funèbre a vu la participation de certaines personnalités religieuses locales, des familles de victimes, des hommes politiques.Dans une atmosphère de joie et de tristesse le décor fut planté pour le règlement de ce dossier par une démarche prise en commun accord entre le COVIRE et le HCE sous la bénédiction de quelques Imams.

Dans le discours qu’il a prononcé, Sy Abou président du COVIRE, s’est fait le messager des victimes dont il en est une. Il a rappelé la dure et implacable réalité vécue des années durant par les veuves, les orphelins, les rescapés.En revisitant cette page sombre, le président du collectif des victimes de la répression a exprimé sa reconnaissance à l’endroit du Général sur qui dit-il les familles éplorées fondent un grand espoir en lançant à l’adresse de Mohamed Ould Abdel Aziz que «c’est une main propre qui peut essuyer les larmes».

Il ne reste plus aux victimes des atrocités que de venir à bout de leur souffrance par le pardon et la foi. Sy Abou a invité toutes les personnes consternées par ces années de plomb à surmonter l’amertume et de dépasser par le courage et la tolérance ce passé mélancolique pour se tourner vers une Mauritanie réconciliée avec elle-même. Le général est monté à la tribune pour partager la tristesse avec tous ceux qui ont subi des atrocités que rien ne saurait justifier et que ni la religion, ni la morale, ni la loi n’autorise la mise en œuvre.

Les mots pour partager avec les victimes cette tragédie de l’histoire récente du pays résonnaient forts dans le discours et indiquent que le dépassement doit se faire par la foi la magnanimité et grandeur morale. Ould Abdel Aziz s’est consolé que les victimes aient «décidé de venir à bout de l’agression par le pardon». Mais reconnaît qu’aucune indemnisation, aucune compensation n’équivaut à une vie humaine . Le Général a prôné ainsi l’apaisement sans adresser de façon directe les excuses de l’Etat ni faire mention de la mise en lumière de cette passé ne serait-ce que par la création d’une commission d’enquête en vue de situer les responsabilité. Car le pardon ne se décrète pas. Le discours à lui seul tient –il lieu pour mettre un point final à cette page ?

Réactions de partis et d’Ong.

C’est hier soir que le président du HCE est arrivé au chef-lieu de la commune de Maghama, dans la région du Gorgol, après une journée passée en prières et prosternations à Kaédi, à la mémoire des victimes des années de braise. C’est aussi à partir de cette Wilaya que le coup d’envoi des Journées nationales de réconciliation et de règlement du passif humanitaire a été donné. Des journées qui sont restées toujours pleines de lacunes et d’insuffisantes, notamment au cours des concertations de 2006 où les Ongs fortement impliquées dans ce dossier ont crié au scandale visant à enterrer sans procès la plus vile histoire dans cette terre d’Islam et de tolérance.

L’événement était grandiose pour les gens de la Vallée, lesquelles meurtries par des années de souffrances sans la moindre consolation ont salué la visite du président du HCE, le Général Mohamed Ould Abdel Aziz, dans l’espoir de caresser le rêve de la réhabilitation de la mémoire de leurs proches, tués sous les feux de la barbarie politico-ethnique. Dans les différentes allocutions, le ton était presque le même, imprégné d’émotion, de tristesse, de larmes, mais également d’espoir que justice soit faite pour les victimes orphelins, veuves et autres opprimés.

La visite du Général au triangle de la pauvreté, puis au Gorgol, pour donner l’impression à l’opinion nationale et internationale qu’il est sur la bonne voie pour traiter les nombreux problèmes liés à l’esclavage et au passif humanitaire, a suscité bon nombre d’interrogations auprès des partis politiques et de certains Ongs, qui voient dans la démarche une tactique d’ordre purement politicien.

Position du Rfd.

En réaction à cette visite, le parti d’Ahmed Ould Daddah a rappelé le combat historique qu’il n’a cessé de mener depuis 1992 pour que l’ensemble des acteurs politiques et sociaux soient impliqués dans le règlement de « ce dossier d’extrême gravité ». Un règlement que ce parti appelle à être solutionné « dans un esprit de responsabilité et de sérénité ». Selon le Rfd « les innombrables implications du passif humanitaire en termes de droits humains, sur l’unité nationale, la restauration de la cohésion sociale et la garantie de la paix civile exigent des solutions appropriées, justes et équitables ».

Le parti d’ Ahmed Ould Daddah est convaincu que « le moment et le contexte de la grave crise politique et institutionnelle que traverse le pays risquent d’imprimer un caractère opportuniste et électoraliste à l’initiative d’un pouvoir en quête de légitimité politique et de légalité constitutionnelle ».Le parti juge que « ce dossier mérite d’être traité dans un esprit de sérénité, loin des calculs conjoncturels et des contingences politiciennes » et appelle à « un dialogue national impliquant les victimes, les ayants droits, les oulémas, les acteurs politiques, la société civile dans un contexte politique apaisé, emprunt de légitimité, de sérénité et de consensus national ».

Enfin, il considère « que toute initiative partisane tendant à instrumentaliser ce dossier pourrait compromettre sa solution effective et durable au préjudice des intérêts des victimes, des ayants droit ainsi que de l’unité, de la sécurité et de la stabilité du pays ».

Réaction du Fndd.

Pour sa part, le Fndd estime que les voyages du Général au triangle de la pauvreté et dans la région du Fleuve sont une occasion pour lui « pour lancer sa campagne électorale ». La coalition anti-putsch passe à un exercice critique des richesses du président du Général, pour attirer sur ce qu’elle semble présenter comme une duperie des populations en bonne et due forme. Le Fndd parle de détournements, du ranch du Général « équipé de nombreux sondages et d’une clôture grillagée de plusieurs dizaines de kilomètres » avant de s’interroger d’où « vient tout ce matériel ? N’était-il pas plus utile pour protéger des champs des cultivateurs et pour étancher la soif des localités visitées ? « . La coalition évoque également  » le coût de ces déplacements de campagne, pour le trésor public et pour les citoyens ».

A propos du passif humanitaire, le Fndd « s’interroge où se trouvait ce Général en 90-91? «  avant de se demander s’il n’est pas « la même personne que celle qui reprochait au Président Sidi d’avoir prononcé son discours du 29 juin 2007 sans le consulter ? N’est-il pas le responsable, par l’absurde coup d’Etat qu’il a fait, de l’arrêt des financements extérieurs qui devaient servir à réaliser les programmes d’insertion durable en faveur des rapatriés et de développement au profit des habitants de la vallée? « .

Le Fndd dit rejeter « toute solution concoctée en catimini par des béni oui – oui et imposée aux ayants droit du passif humanitaire » et rappelle qu’il reste « convaincu de la nécessité de trouver une solution équitable et durable aussi bien pour le passif humanitaire que pour une insertion réussie des rapatriés ». A son avis, « une telle solution devant obligatoirement passer par une large concertation avec les ayants droit, avec les organisations de la société civile impliquées, avec les partis politiques ».

Le Csvvdhm dénonce.

Les Ong des droits de l’homme qui mènent sans équivoque le combat réel pour le règlement du passif humanitaire, ont exprimé quant à elles leur désapprobation totale de cette manière avec laquelle le Général agit en solo pour régler le passif humanitaire, un dossier très complèxe, confirment-elles. Selon Mme Lalla Aicha Sy, présidente du Csvvdhm, « les mesures que le HCE et son chef entendent mettre en œuvre relèvent d’une approche opportuniste et électoraliste » et « ne s’inscrivent pas dans une dynamique de construction d’une unité nationale prenant étroitement compte des exigences de vérité et de justice, et du devoir de mémoire ».

Et d’ajouter  » ces mesures ne sont pas seulement une violation du droit des morts et des vivants, mais (…) contribuent également à éloigner les chances de construction d’une Mauritanie unie, juste et égale ». La présidente du Csvvdhm se demande à propos de « ce qui cimente l’unité et enrichit la conscience civique d’un peuple » qui à son avis, n’est autre chose que « la pleine connaissance des tragédies qui l’ont meurtri, l’appropriation par les uns des malheurs des autres, et la claire conscience que la vérité et la justice doivent s’appliquer aux crimes présents et passés, quels qu’en soient les auteurs ».

Plusieurs Ongs, toutes membres du Fonadh ont cosigné avec le Csvvdhm le communiqué qu’il a rendu public dont l’Afcf, l’Amdh, Sos-Esclaves, le Gerdes, Reve, le Collectif des Rescapés Anciens Détenus Politiques Civils Torturés, la Ligue Africaine des Droits de l’Homme Section Mauritanienne, les Collectifs Anciens fonctionnaires de la Police, l’ Enfance Sans Partage.

CTD et MOML

 
Toute reprise d’article ou extrait d’article devra inclure une référence à www.cridem.org

Posté   le 26 Mar 2009   par   biko

Share.

About Author

Comments are closed.