Mort de Zyed et Bouna: Le non-lieu des policiers annulé, un procès est possible

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Une décision au goût de victoire pour les familles de Zyed et Bouna. La Cour de cassation a annulé mercredi le non-lieu qui avait été prononcé en faveur de deux policiers dans l’enquête sur la mort des adolescents en 2005 à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) après une course-poursuite avec les forces de l’ordre.

La chambre criminelle de la Cour de cassation a renvoyé le dossier devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes pour qu’elle statue de nouveau. En octobre 2010, deux policiers avaient été renvoyés par les juges d’instruction devant le tribunal correctionnel pour «non assistance à personne en danger», mais le parquet de Bobigny avait fait appel. Suivant les réquisitions du parquet général qui estimait que les deux policiers n’avaient pas eu connaissance de la réalité du danger, la cour d’appel de Paris avait prononcé un non-lieu en avril 2011.

«Un grand jour» pour la famille

Zyed Benna, 17 ans, et Bouna Traoré, 15 ans, avaient péri électrocutés, le 27 octobre 2005, dans un transformateur EDF où ils s’étaient réfugiés. Leur mort avait déclenché des violences urbaines qui s’étaient étendues à l’ensemble des banlieues françaises.

«Je suis très fier de la justice française», a déclaré l’avocat des familles des deux jeunes, Me Jean-Pierre Mignard, saluant une décision «historique». Son confrère devant la Cour de cassation, Me Patrice Spinosi, s’est félicité d’une «grande décision». «C’est un événement, un grand jour», s’est réjoui Siyakha Traoré, frère aîné de Bouna. «Je suis soulagé, maintenant on va aller de l’avant. J’attends des explications, que tout le monde soit entendu et que la justice fasse son travail», a-t-il ajouté, remerciant «tous ceux qui nous ont accompagnés dans ce combat». «J’espérais, pour moi ils ne sont pas morts pour rien, on doit leur rendre justice», a-t-il ajouté. Le maire de la commune, Olivier Klein (PS), a lui salué une décision «rassurante et courageuse», qui «donne confiance en la justice», espérant qu’un procès «puisse se tenir dans des délais raisonnables».

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Un syndicat policier dénonce «la lenteur de la justice»

Me Daniel Merchat, l’avocat des deux policiers qui avaient été mis en examen pour non-assistance à personnes en danger, juge «présomptueux» de considérer d’ores et déjà que ses clients seront renvoyés devant un tribunal. «L’audience, si audience il y a, n’est pas à échéance visible», a-t-il estimé, rappelant que ses clients sont présumés innocents. Le syndicat Unité SGP Police FO (1er syndicat de gardiens) a regretté «la lenteur de la justice qui par manque de moyens laisse en permanence doute et désespoir s’installer», se disant confiant que soit reconnue «l’innocence de nos collègues».

Dans son arrêt, la Cour de cassation a estimé que la cour d’appel de Paris, qui avait prononcé le non-lieu en avril 2011, n’a pas répondu à l’argumentation des parties civiles selon laquelle les policiers n’avaient aucune certitude que les jeunes ne se trouvaient pas sur le site EDF. Une phrase, prononcée par l’un des policiers lors des échanges radio le soir des faits, s’était notamment retrouvée au coeur des débats lors de l’audience devant la Cour de cassation le 3 octobre: «S’ils rentrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau.» La Cour a également souligné que la chambre de l’instruction ne s’est pas expliquée sur la «passivité» d’une policière.

Un drame «absurde»

Pour l’avocat général Patrick Bonnet, qui avait requis la confirmation du non-lieu, «rien dans le dossier ne permet d’affirmer que quelqu’un, à un moment ou à un autre, a vu les enfants se réfugier» sur le site. Les fonctionnaires avaient «bien connaissance d’un danger, mais pas d’un péril imminent», a argué l’avocat général, estimant que l’on ne peut pas renvoyer les policiers devant le tribunal correctionnel sur «des suppositions aussi vagues et des hypothèses».

A l’inverse, pour l’avocat des familles devant la Cour, Me Patrice Spinosi, «la seule logique» des fonctionnaires était d’appréhender les fugitifs à qui aucune infraction n’était reprochée. Selon lui, «à aucun moment (…) les forces de police n’ont cherché à avertir les enfants du risque». Il avait ainsi résumé «l’absurdité de ce drame»: «Les enfants qui courent parce qu’ils sont poursuivis par les policiers et les policiers qui les poursuivent parce que les enfants courent».

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