Us et Coutûmes Soninké,le rituel de mariage Soninké: la cérémonie 2ème partie

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Après l’acceptation du tamma, le père de la fille renvoie les émissaires de la famille du prétendant auprès des dames qui s’occupent de tout ce qui est question de dépense. À partir de cet instant, les choses sont prises en main par la mère de la future mariée. Les deux familles se rencontrent ensuite et, du côté des femmes, pour le , qui marque la fin des fiançailles. Il s’ensuit le versement de la dot qui est une vieille tradition pratiquée depuis la nuit des temps et qui conditionne l’alliance matrimoniale. Les deux familles négocient pour arrêter la somme que le prétendant aura à verser pour pouvoir épouser sa fiancée. Ce qui rend la dot si importante pour le mariage chez les ou partout ailleurs, c’est qu’elle est synonyme d’union de deux familles. Aujourd’hui, elle est exposée aux abus du monde moderne. Son prix a fortement évolué dans le temps et s’élève maintenant à des sommes astronomiques. L’émigration est passée par là et a créé une très forte inflation. En plus du montant faramineux, du matériel électroménager, un écran plat, des téléphones, etc., sont exigés.« Cette dot revient au ménage. Pour bonifier cet argent, la mère va partager la dot entre les femmes et le jour du mariage, tous ceux qui ont reçu une somme amènent un présent », précise Abdou Khadre Tandia. Le mariage ne devient vraiment légitime que si le futtu est conclu. Ce jour-là, explique Idrissa Diarra, la mère de la jeune fille distribue des noix de cola. Et après concertation, la date du mariage est fixée par la famille de la future mariée. Cependant, la période qui s’écoule jusqu’au jour du mariage peut-être plus ou moins long.

Selon , la dot est versée la veille du mariage. « La femme devient automatiquement la femme du garçon qui la convoite. Autrefois, quand le franc symbolique était donné, la jeune fille pouvait rester chez elle pendant deux à trois ans. C’est au moment où l’on choisit le jour du mariage que l’on donne l’argent de la dot et ça ne dépassait pas 4000 ou 5000 francs », précise-t-elle.

Selon certains, la logique voudrait, pour éviter toute tentation, que le couple ne se rencontre pas. Cela, en vue de créer un climat de confiance, mais aussi de permettre aux tourtereaux de rester tranquilles jusqu’au mariage. « Aujourd’hui, on note une certaine déperdition de part et d’autres, tout cela parce qu’on a laissé la bonne voie. Il faut qu’on revienne à la tradition ancienne, aux valeurs. Autrefois, une jeune fille qui se mariait avait entre 12-13 ans. Elle n’était donc pas prête pour le mariage. C’est pour cette raison qu’on ne faisait pas futtu et tamma ensemble, parce que dès que la dot est donnée, la jeune fille devient automatiquement une épouse », souligne Mara Danthira Traoré.

La cérémonie du mariage

Chez les Soninkés, le mariage dure trois jours. Généralement, les festivités commencent le mercredi pour se terminer le vendredi. Le mercredi, la jeune fille rassemble tous les habits des parents. C’est une manière, selon M. , de montrer que c’est le dernier travail qu’elle va effectuer. Elle va les laver au fleuve avec ses aînées. « Elles reviennent vers 19 et 20 h, c’est à ce moment qu’une griotte vient informer les filles que la fiancée doit se marier le lendemain. Cette annonce doit être accompagnée des cris de la fille en pleure. Ces amies averties viennent aussi et se mettent au tour d’elle. C’est ce qu’on appelle le tigandé. Il s’agit de chansons au cours desquelles les filles donnent des conseils à la nouvelle mariée », poursuit-il. « Telle fille, tu vas dans telle maison. C’est une maison ou tu n’as pas de père ni de mère. Il y aura certainement des gens qui viendront te demander qui t’a tressé ou qui a cousu ton pagne. Il faut te méfier d’eux, car tes vrais parents, tes vrais conseillers, c’est ta belle famille. Donc, il ne faut pas écouter ces gens », explique Tapa Bathily. Au moment où les filles chantent, la mère de la mariée organise une séance de tam-tam, que les filles viendront disperser. « C’est une manière, pour elles, de manifester leur mécontentement, de montrer aux parents qu’elles n’étaient pas contentes de se séparer de leur amie. Par la suite, les garçons reviennent pour réorganiser le tam-tam, et les filles, qui étaient mécontentes, viennent pour manifester leur plaisir et danser avec la famille jusque tard dans la nuit », indique-t-il.

Le jour de la célébration du mariage, c’est-à-dire le jeudi matin, la jeune fille invite sa classe d’âge appelée fedalemu pour passer la journée ensemble dans la chambre d’isolement prénuptiale pour festoyer et à entonner des chants préparatoires à la nuptialité. L’homme en fait autant en jouant aux cartes ou en écoutant de la musique.

Ces festivités sont précédées d’une cérémonie religieuse à la mosquée et au terme de laquelle l’Imam entérine l’union des deux époux devant la famille, les témoins et les amis. Cette cérémonie est ponctuée d’invocations, de prières en signe de bénédiction pour cette union.

 LE BAIN PURIFICATEUR

Le jeudi en fin de soirée, la mariée est soumise à un bain rituel pour se purifier, en vue de la cérémonie nuptiale. Ce rituel puise ses sources dans des traditions ancestrales et enrichit le mariage tout en lui conférant un cachet particulier. Aujourd’hui, malgré la menace de la modernité, cette particularité et cette authenticité sont conservées et perpétuées de génération en génération. Pour l’étape du bain purificateur la future mariée est entourée de femmes qui lui sont proches. Cette cérémonie solennelle, organisée en fin de soirée dans la concession paternelle, consiste à la purifier avant de la conduire chez son mari. Seules les personnes initiées (la griotte de la famille par exemple) et les sages comprennent mieux la quintessence du rituel. Au moment de la laver, elle s’assoit sur un mortier troué. Selon certains témoignages, le fait de l’installer sur le mortier signifie tout simplement qu’elle doit être sage, humble, très calme. Cette purification, selon d’autres, la protège des mauvaises langues et la rend psychologiquement apte à affronter un entourage familial différent du sien.

« La cérémonie est rythmée par les chants et les danses de ses mères, tantes, sœurs et amies pour l’inciter à rester dans sa nouvelle demeure. À la fin de la bénédiction religieuse, on lui enlève les vêtements trempés pour la couvrir de blanc avec des habits traditionnels », note Tapa Bathily. « Elle a le dos tourné et, avec son pied, elle donne un coup au mortier pour le faire tomber. Elle est désormais prête à affronter les réalités de la vie de couple », ajoute-t-il.

La nouvelle mariée est ensuite accompagnée chez son époux et chaque pas est accompagné de chanson jusqu’à ce qu’elle rejoigne la maison conjugale, la chambre nuptiale. Le mariage est consommé cette nuit.

 Le pagne taché de sang, symbole de la virginité

Jadis, la question du bien-fondé de la virginité avant le mariage ne posait pas problème dans les sociétés africaines traditionnelles. Il était courant qu’une jeune fille ait sa première relation sexuelle avec son époux.

Cela était d’autant plus marqué par le fait qu’elle se mariait très jeune. Au pays soninkés, nombreux sont les hommes qui exigent la virginité de leur épouse. Et dans certaines familles, la fameuse tradition de drap blanc est un rite sacré, capital même. « Elle consiste à exhiber le linge taché de sang à la sortie de la chambre nuptiale comme preuve de la bonne conduite de la nouvelle mariée », soutient Tapa Bathily. Cet acte, qui remonte aux temps immémoriaux, est vécu comme un examen important par la famille de la jeune mariée. Si cette dernière passe avec brio, elle fait la fierté de la famille, et la bonne nouvelle est souvent accompagnée de chants, de danses. « Théoriquement, les gens tiennent à la virginité de la nouvelle mariée. Maintenant, il y a toute sorte de subterfuges pour camoufler cela. En principe, quand on trouve la fille vierge, on met un cadeau sous l’oreiller. Montrer le pagne nuptial tacheté de sang aux gens, maintenant, il y a toute sorte de combines. Des fois, il y a des scandales. Certains jeunes refusent de donner des cadeaux, parce qu’ils n’ont rien trouvé. Des fois, ça amène des ruptures et c’est de plus en plus fréquent », argumente l’historien . Dans de nombreux villages de Bakel, comme , , , elle est encore d’actualité. « La virginité de la femme est très importante. Il y a la cuisse, si elle est cassée ça montre que la fille n’est pas vierge, si elle n’est pas cassée que la fille a été sage, en contrepartie, le garçon va lui donner une récompense », estime Tapa Bathily. Pour Sophie Diallo, cette pratique est toujours appliquée à Manael. « Les gens attendent toujours que la fille donnée en mariage soit vierge », fait-elle savoir. « Les hommes qui ont voyagé et qui connaissent la vie ne l’imposent pas à leurs femmes, car ils savent que de nos jours, il est rare de trouver une fille vierge. Mais, un homme qui est né et a grandi au village s’attend toujours à ce que sa femme soit vierge », indique-t-elle.

Selon Mara Danthira Traoré, « Chez les , par exemple, si le mari trouve sa femme vierge, il met un cadeau sous l’oreiller. Chez les Soninkés, le mari remet une somme à l’accompagnatrice de la jeune mariée, charge à elle de le remettre aux beaux parents. Par contre, quand il n’y a rien, les murmures et les commentaires vont bon train. Cependant, quand on aime bien sa femme, même si on ne la trouve pas vierge, on s’en f…», a-t-elle expliqué. Selon Tapa Bathily, « si la fille n’est pas vierge, la relation n’est pas automatiquement rompue, mais la jeune fille cause une grande déception, une très grande honte à sa famille ». Certains hommes, s’ils ne trouvent pas leur femme vierge, dit-il, la protègent et envoient de l’argent à la famille pour dire qu’ils étaient satisfaits. « En retour, ces hommes gardent le secret. Dans d’autres cas, la nouvelle mariée encaisse des remarques blessantes. C’est le prix à payer par celles qui n’ont pas su se préserver », souligne-t-il. Il arrive aussi qu’un poulet ou qu’un mouton fasse les frais de l’affaire.

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